Les années 2000 ont été le théâtre de la prolifération de sites internet négationnistes et extrémistes. De véritables batailles tant juridiques que politiques sont encore régulièrement menées pour faire appliquer une législation française selon laquelle la liberté d’expression n’autorise pas la diffusion de contenus haineux. La menace que l’extraterritorialité du droit américain fait peser sur les données, la manipulation de l’opinion par les fakes news, ou encore le siphonage des données personnelles à des fins commerciales sont autant de violations de nos valeurs.
Dans ce sens, l’Appel de Paris lancé en 2018 est l’un des premiers textes marquant l’ambition française pour un Internet intègre et accessible.
Certains acteurs économiques internationaux (GAFAM, BATX) ont des chiffres d’affaires comparables aux budgets d’États puissants, et donc des capacités d’innovation et de transformation de l’économie potentiellement supérieures aux Etats. Dans ce contexte, Internet est plus que jamais un outil de puissance et le cyberespace un lieu d’exercice de la souveraineté des Etats. L’enjeu sous-jacent n’est rien de moins que la maîtrise de notre présent et de notre destin tels qu'ils se manifestent et s'orientent par l'usage des technologies.
Différents grands pays, dont la France, affirment leur volonté de souveraineté dans le cyberespace, parce que celle-ci est menacée. Des initiatives sont prises pour la défendre ou la renforcer à l’échelle nationale et européenne.
Toutefois, cette souveraineté ne doit pas être appréhendée sous un prisme défensif mais comme une construction de capacités.
Il importe que les grands groupes industriels français, aux côtés des acteurs étatiques, s’alignent sur ces initiatives, partagent ces enjeux et accompagnent la construction et la défense de cette souveraineté numérique.
La reconquête d’une souveraineté numérique n’est pas une utopie, mais le fruit d’une ambition politique qui s’appuie sur une stratégie globale et des actions au niveau de l’Etat, des collectivités territoriales, de la société civile et du secteur privé, mais aussi et surtout au niveau de l’Europe.
Par Eve Gani, Directrice Innovation Défense & Sécurité chez Sopra Steria
Et Jean-Luc Gibernon, Directeur du Développement CYBER chez Sopra Steria