LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

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Pour répondre aux fortes attentes d’une société en mutation, pour assurer les conditions d’une croissance durable dans un environnement très concurrentiel, pour défendre et adapter un modèle social, socle du pacte républicain et possible rempart contre les conséquences de la crise financière mondiale, les organisations publiques se doivent d’être performantes. Les équipes Secteur Public d'EY ont pour ambition d’accompagner les administrations vers davantage d’efficacité, de performance et de transparence.

8 min

Sondage : les rémunérations pèsent sur l’attractivité de la fonction publique

Alors que le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques fait de l’attractivité sa priorité, une forte majorité des personnes interrogées dans l’enquête Acteurs publics/EY pour l’Observatoire des politiques publiques réalisée par l’Ifop n’est pas attirée par la fonction publique. Les plus jeunes pointent du doigt les rémunérations et les conditions de travail difficiles de certains métiers.

La loi de transformation de la fonction publique, promulguée le 6 août 2019, ambitionnait de bâtir une fonction publique “plus agile, ouverte et attractive”. Deux ans après cette grande réforme, comment les Français perçoivent-ils la fonction publique ? [lire la tribune d’Olivier Bouet, directeur, EY Consulting, “secteur public”, et Arnaud Lizé, directeur associé, EY Consulting, “secteur public”]

Elle séduit aujourd’hui une minorité de Français et attire donc de potentiels talents : 17 % des personnes interrogées déclarent pouvoir avoir envie d’intégrer la fonction publique dans les prochaines années. Dans le détail, trois principaux clivages sont constatés. D’une part, un clivage générationnel émerge : les jeunes sont surreprésentés dans la volonté de s’investir dans la fonction publique (31 % des moins de 25 ans contre seulement 11 % des 50-64 ans, ce qui peut paraître logique pour cette dernière tranche d’âge compte tenu des barrières liées à l’âge dans la plupart des concours).

Prime à la stabilité salariale

Parmi les Français souhaitant potentiellement intégrer la fonction publique dans les années à venir, 63 % déclarent être séduits par la garantie de l’emploi liée à celle-ci : cette stabilité salariale est de loin la première raison poussant à s’engager dans la fonction publique. Notons que le prestige de la fonction publique n’est que très peu mentionné, suggérant de potentielles carences d’image (10 %, mais tout de même 23 % chez les moins de 25 ans).

En outre, les raisons de ne pas intégrer la fonction publique se révèlent hétérogènes et diverses. Parmi les motifs principaux, 53 % des personnes interrogées déclarent ne pas souhaiter changer de métier, un quart (25 %, et 33 % des 18-24 ans) citent le niveau de rémunération trop bas et 24 % le mode de fonctionnement supposé rigide ou lourd de l’administration. Les conditions de travail de certains métiers (gendarmerie, gardiens de prison, etc.) sont également citées par 15 % de ceux qui ne sont pas tentés par la fonction publique. Sur cet item, le pourcentage grimpe à 23 % chez les 18-24 ans.

Pour pallier les carences de la fonction publique, des leviers d’action émergent dans l’opinion. Proposer des rémunérations plus compétitives (82 %), apparaît comme un vecteur auprès des Français pour rendre la fonction publique plus attractive.

Enfin, sur le sujet brûlant de la “privatisation” du statut de la fonction publique, près d’un Français sur deux (43 %) considère que le statut devrait être aligné sur le droit du travail privé. Les générations les plus âgées (48 % chez les 50 ans et plus) sont davantage favorables à cette privatisation que les jeunes (34 % chez les moins de 25 ans).

Frédéric Dabi, directeur général “opinion” de l’Ifop

L’enquête Acteurs publics/EY pour l’Observatoire des politiques publiques réalisée par l’Ifop a été menée par questionnaire auto-administré en ligne les 4 et 5 octobre 2022 auprès d’un échantillon de 1 013 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de famille) après stratification par région et catégorie d’agglomération.

ANALYSE

Attractivité : quelles solutions pour les employeurs locaux en difficulté ?

Par Olivier Bouet, directeur, EY Consulting, secteur public,
et Arnaud Lizé, directeur associé, EY Consulting, secteur public

Les métiers exercés dans la fonction publique territoriale et hospitalière – aux compétences pour le moins diversifiées – sont des services publics essentiels à la vie quotidienne des Français qui font vivre près de 3,2 millions d’agents dans le pays. Aujourd’hui, 5 défis clés sont à relever pour renforcer l’attractivité RH de ces employeurs de proximité, confrontés à des difficultés de recrutement et de rétention des talents.

1. La capacité pour les employeurs publics locaux à attirer et fidéliser leurs personnels est un sujet clé : 39 %1 des employeurs territoriaux disent éprouver des difficultés à attirer des candidats en 2021 (ils étaient 30 % en 2015) et 67 % des responsables de ressources humaines font état de difficultés sur la période récente pour recruter des fonctionnaires, selon le dernier rapport sur la fonction publique territoriale publié par l’IGA, le CNFPT et l’ANDRHCT2 (janvier 2022), notamment dans les domaines de la petite enfance et du bâtiment (concurrence du secteur privé) ou dans le domaine des ressources humaines (pas assez de candidats formés).

2. Plusieurs métiers sont en tension dans les territoires, en particulier dans la sphère médico-sociale (travailleur social, assistant éducatif petite enfance, animateur enfance-jeunesse), dans l’administration de proximité (secrétaire de mairie, assistant RH) ou encore dans le secteur clé du numérique, et certains de ces métiers sont par ailleurs de plus en plus exposés au contact d’usagers parfois en souffrance.

3. Des inégalités géographiques viennent aggraver des difficultés d’attractivité déjà connues, en particulier au sein de territoires enclavés (moindre accessibilité des transports, déserts médicaux), dans lesquels une plus grande polyvalence est nécessaire et attendue sur les postes. Typiquement, s’agissant de la fonction publique hospitalière, ce manque de polyvalence et l’inadéquation croissante entre l’organisation de l’appareil de formation et les besoins de santé font peser des risques sur la prise en charge des patients “complexes”.

4. La question de la rémunération reste un élément central dans la proposition de valeur RH des collectivités et des hôpitaux, en particulier face à l’inflation et à l’évolution des prix des logements dans les territoires les plus attractifs : les territoires qui souhaitent recruter de nouveaux agents dans les zones où le logement est cher pour remplacer des agents partant à la retraite se heurtent à des blocages croissants.

5. Enfin, l’image de la fonction publique, en particulier territoriale, n’est pas suffisamment bonne, comme le montre la dernière enquête sur l’attractivité de la fonction publique territoriale publiée par la direction interministérielle de la transformation publique (novembre 2021), essentiellement en raison de la méconnaissance qu’ont les citoyens – les jeunes notamment – de ses métiers, souvent réduits aux services qu’ils utilisent, ou en raison d’une image encore trop bureaucratique du fonctionnement des administrations locales.

Afin de renforcer l’attractivité des métiers exercés, nous avons identifié 3 pistes opérationnelles au regard de notre expérience de l’accompagnement des territoires qui font face à ces difficultés grandissantes.

Construire une proposition de valeur RH plus attractive pour les agents
Si le point d’indice des agents publics a bien été revu à la hausse en 2022, la question d’une politique RH plus incitative se pose toujours : dans cette perspective, la création d’une prime d’attractivité fondée sur la stabilité de l’agent, sur le modèle des primes de fidélisation versées aux agents de l’État exerçant en Seine-Saint-Denis, pourrait faire son chemin. De même, la non-reconduction dans le projet de budget pour 2023 du fonds d’accompagnement interministériel des ressources humaines que pouvaient solliciter les ministères et opérateurs peut être l’occasion de relancer l’idée d’un fonds pour l’attractivité des fonctions publiques territoriale et hospitalière, qui inciterait les agents ou les étudiants à rejoindre les collectivités et les hôpitaux en tension ou en zones sensibles. Enfin, certains employeurs locaux gagneraient à réserver une partie du contingent de logements intermédiaires à leurs jeunes recrues en début de carrière, à l’instar de ce qui existe pour les fonctionnaires d’État sur le contingent préfectoral.

Déployer une politique de marque employeur décomplexée
Afin d’améliorer l’image de la fonction publique dans les territoires, il devient essentiel de renforcer la notoriété des employeurs locaux.

Plusieurs pistes sont à explorer en ce sens : mettre en place des campagnes de marketing d’influence sur les réseaux sociaux, y publier régulièrement des portraits d’alumni, développer des dispositifs de type “Vis mon job” pour faire mieux connaître les métiers, nouer des partenariats avec des producteurs pour incarner au cinéma ou dans une série des métiers encore méconnus (sur le modèle des policiers, juges ou urgentistes) pour permettre aux jeunes de se projeter plus facilement dans une carrière qu’ils ont découverte à l’écran, ou encore organiser des “challenges” en matière d’innovation publique pour faire connaître les derniers projets de transformation qui ont changé la vie des usagers, etc.

Donner aux agents les outils et les parcours RH dont ils ont besoin
Il devient aujourd’hui indispensable de réfléchir à des modes d’organisation du travail permettant d’introduire plus de souplesse horaire ou encore à des modes de management, à une déconcentration de la prise de décision, permettant de donner beaucoup plus de responsabilités directes aux cadres intermédiaires des fonctions publiques territoriale comme hospitalière, voire aux agents sur certains sujets. En particulier, il est indispensable de doter les agents publics d’outils numériques modernes de communication et d’interaction afin de faciliter leur travail. Enfin, pour accompagner la progression de carrière des agents, la fonction publique pourrait développer et communiquer sur une trajectoire d’évolution de compétences offrant plus de perspectives, en proposant par exemple certaines passerelles clés (aide-soignant/infirmier, auxiliaire/puéricultrice), pour tirer vers le haut et accompagner l’évolution des métiers.

[1] 12e baromètre RH des collectivités locales, publié le 16 septembre 2021 par Randstad avec Villes de France, l’ADCF et l’ANDRHCT.
[2] L’inspection générale de l’Administration, le Centre national de la fonction publique territoriale et l’Association nationale des directeurs des ressources humaines des collectivités territoriales. 

Étude internationale : une convergence des enjeux d’attractivité
EY a réalisé une étude auprès d’un panel constitué de plus de 17 000 employés dans le monde et plus de 1 600 employeurs incluant 44 administrations publiques réparties dans 22 pays (“Work Reimagined Employee Survey”, EY, 2022). Plusieurs enseignements sont à retenir :
• Les 5 principaux enjeux auxquels doivent faire face les employeurs publics portent sur la hausse du coût de la vie liée à l’inflation, l’incapacité structurelle à pourvoir les postes sur les métiers les plus critiques, la difficulté de répondre aux départs en retraite de la dernière génération au regard des attentes spécifiques des nouvelles générations, la capacité des administrations à réinterroger l’allocation des ressources grâce à la transformation numérique et la manière dont ces dernières ont su tirer parti des enseignements de la crise du Covid pour leurs méthodes de travail.
• Pour répondre aux besoins de rétention des talents, 52 % des agents pensent qu’il faut augmenter les rémunérations et 41 % d’entre eux sont prêts à changer de poste pour cela (30 % au niveau de l’ensemble des employeurs) ; selon les employeurs publics interrogés, 50 % des raisons pour lesquelles un agent quitte son poste sont liées à la promesse d’un parcours de carrière plus attractif et d’une meilleure rémunération (vs. 30 % de la population globale).
• Même après la crise du Covid, la perception qu’ont les agents publics du niveau de maturité de leur employeur à proposer plus de flexibilité au travail est seulement de 58 %, alors qu’elle est de 70 % pour l’ensemble des employeurs interrogés.
• La perception qu’ont les employeurs publics de la façon dont leur culture managériale a su s’adapter aux transformations engendrées par la pandémie est nettement plus faible que celle de la moyenne des employeurs sollicités (15 % vs. 58 %). De même, la perception d’une amélioration de la productivité au travail varie fortement : seulement 36 % des employeurs publics estiment qu’elle a augmenté durant la pandémie vs. 62 % du total.
• Enfin, plus généralement, le niveau d’optimisme des employeurs publics sur la capacité de leur administration à faire face aux enjeux issus de la crise est nettement inférieur (7 %) à celui perçu par la totalité des employeurs (29 %), ce qui interpelle sur la capacité qu’ont certains managers publics à croire en la pérennité de leur modèle. 

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