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Retraites : les syndicats de la fonction publique veulent frapper plus fort le 31 janvier

Forts du succès de la première journée de mobilisation, le 19 janvier, les syndicats de la fonction publique veulent transformer l’essai ce mardi 31 janvier, contre le projet de réforme des retraites. Pour mobiliser davantage, ils comptent notamment sur la “polémique” née autour du message vidéo adressé aux agents publics par le ministre Stanislas Guerini pour vanter les mérites de la réforme.

Transformer l’essai et surfer sur le succès du 19 janvier. Voilà le défi que veulent relever les syndicats de la fonction publique ce mardi 31 janvier, deuxième journée de mobilisation contre le projet de réforme des retraites, dont l’examen débute aujourd’hui-même à l’Assemblée nationale. L’optimisme est en tout cas de mise chez les représentants du personnel, déterminés à mobiliser de nouveau en masse et pas peu fiers des taux de mobilisation enregistrés lors de la première journée d’action : plus d’un agent public sur 4 a fait grève le 19 janvier.

“Nous sommes déterminés à gagner le retrait de la réforme en mobilisant encore plus le 31 janvier”, affirme ainsi Céline Verzeletti, de la CGT, en mettant l’accent sur la nécessité, selon elle, de “continuer la bataille contre cette réforme nocive”. “Nous restons dans un état d’esprit positif et combatif, abonde Christian Grolier, de Force ouvrière. Nous attendons autant de monde, si ce n’est plus que le 19 janvier.” 

“L’objectif est de démontrer que la mobilisation du 19 janvier se poursuit et se renforce”, ajoute Pascal Kessler, de la FA-FP. Il est rejoint par Nathalie Makarski, de la CFE-CGC : “Nous appelons les agents publics à se mobiliser encore plus massivement que lors de la mobilisation du 19 janvier pour bien faire entendre au gouvernement que son projet de réforme n’est pas acceptable. Cette réforme n’est pas un progrès, elle est injuste et inutile.” 

Reconduction des grèves envisagée 

Les syndicats ont toujours dans le viseur les mesures d’âge prévues par le gouvernement, qui concerneront l’ensemble des travailleurs français, fonctionnaires compris. En premier lieu, le recul de l'âge légal de départ à la retraite “avec toutes ses conséquences pour les agents et pour le service public”, selon Luc Farré, de l’Unsa, mais aussi l’accélération de l’allongement de la durée de cotisation “avec ses injustices”, poursuit le syndicaliste. Des mesures d'âge qui, selon les représentants du personnel, occultent les petites avancées de la réforme, dont l’extension à la fonction publique de la retraite progressive. Le gouvernement, quant à lui, n’entend pas céder sur le recul de l’âge légal de départ.

“Nous sommes plus déterminés que jamais, promet malgré tout Benoit Teste, de la FSU. Nous avons de très bons retours du terrain car tout le monde sent que c'est gagnable, mais encore loin d'être gagné. Cela vaut donc le coup de se mobiliser.” Et les syndicats préparent déjà le coup d’après, de l'après-31 janvier. “Si le gouvernement persiste à ne pas entendre le rejet que suscite le report de l'âge d'ouverture des droits, nous envisagerons de nouvelles mobilisations”, anticipe ainsi Mylène Jacquot, de la CFDT. “Les débats sur les modalités de reconduction de la grève commencent à être organisés dans certains secteurs”, confirme Céline Verzeletti pour la CGT. La centrale de Montreuil a d’ailleurs déjà déposé un préavis de grève dans la fonction publique couvrant tout le mois de février. 

Tout l'enjeu, pour les syndicats, réside en effet dans l'inscription de la mobilisation dans la durée alors que les vacances scolaires débutent vendredi 3 février. De quoi faire retomber le soufflé de la contestation, comme lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron, où la mobilisation contre le premier projet de réforme des retraites avait chuté après les vacances de Noël 2019 ? 

Adresses mail personnelles

Les syndicats comptent en tout cas profiter la toute récente “polémique” survenue au sein de la fonction publique pour mobiliser davantage les troupes, à savoir le courriel et la vidéo adressés par le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, aux agents publics sur le projet de réforme des retraites. L’ensemble des agents dont la paye est gérée par la direction générale des finances publiques (DGFIP) a en effet reçu, jeudi 26 janvier, un courriel contenant une prise de parole vidéo du ministre sur la réforme des retraites. Certains agents (et même anciens agents) se sont étonnés, sur les réseaux sociaux, de cette utilisation d’un fichier d’adresses mail parfois personnelles par le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques à des fins de de communication politique.

Le cabinet du ministre, sollicité par Acteurs publics, explique que la vidéo a été envoyée par la DGFIP aux adresses mail renseignées par les agents pour leurs relations avec l’administration sur l’Espace numérique sécurisé de l’agent public (Ensap), lequel offre un accès aux bulletins de paye et de pensions ou encore permet de simuler le montant de sa retraite.

“Contenu RH”

“L’envoi a donc bien été assuré par la DGFIP, comme elle a l’habitude de le faire. Aucune transmission de fichier de contacts n’a été faite entre la DGFIP et le MTFP [le ministère]”, précise le cabinet. Cette procédure, ajoute-t-on, “a déjà été appliquée par le passé, avec par exemple la diffusion d’une lettre aux agents par le ministère sur la protection sociale complémentaire, en janvier”. Et de préciser que ce message vidéo sur la réforme des retraites “est un contenu RH relayant de l'information sur leurs pensions aux agents”. “Cette même vidéo a d’ailleurs déjà été communiquée aux agents il y a 10 jours et mise en ligne sur le site Internet du ministère”, se défend également l'entourage de Stanislas Guerini.

Toute la nuance pourrait résider dans la nature du message : est-il vraiment informatif ou politique ? La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) devra probablement trancher, des plaintes ayant déjà été déposées pour violation du Règlement général sur la protection des données (RGPD).

En attendant, la démarche gouvernementale a fait bondir les organisations syndicales. Quand la CGT a dénoncé un “déni de démocratie”, une “propagande mensongère” et un “détournement de fichier”, l’Unsa a pour sa part condamné une “utilisation abusive des données personnelles des agents par le ministre” et pointé une atteinte à leur vie privée. 

Plaintes auprès de la Cnil

“La faute de Stanislas Guerini, qui a voulu diffuser la propagande gouvernementale, entraîne un mécontentement supplémentaire qui ne peut qu’aider à la mobilisation”, estime Christian Grolier, de Force ouvrière. Pour Gaëlle Martinez, de Solidaires, le gouvernement “est inquiet (et) cela se sent dans sa communication” notamment donc à travers les “envois aux agents de mails à répétition y compris sur les mails personnels”. “Le discours officiel du gouvernement ne rassure pas, bien au contraire, il ne fait que renforcer la motivation à se mobiliser”, renchérit Pascal Kessler, de la FA-FP. 

Dans un communiqué, la Cnil explique qu'elle va  vérifier “si l’envoi du message (de Stanislas Guerini aux agent publics) a respecté les principes généraux de protection des données personnelles et les règles spécifiques fixées par l’acte juridique créant le ou les fichiers concernés”. En ce sens, elle va notamment vérifier “si l’envoi du message était conforme aux finalités du fichier qui a été utilisé” pour adresser ce message vidéo. L’autorité n’est pour l’heure pas “encore en mesure de se prononcer sur la conformité de l’utilisation des données personnelles qui a été faite”. La commission “prendra position ultérieurement”, indique-t-elle. La “polémique” autour de la vidéo de Stanislas Guerini n’est donc pas près de s’éteindre.

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