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Nouvel accès de fièvre entre Emmanuel Macron et l’Association des maires de France

Dans un message adressé à des élus, André Laignel, premier vice-président socialiste de l’Association des maires de France (AMF) a critiqué ouvertement le contenu de la lettre que le Président-candidat Emmanuel Macron vient d’adresser aux édiles. Le camp présidentiel monte au créneau en dénonçant un “tissu de contre-vérités” de la part du soutien d’Anne Hidalgo.

Emmanuel Macron et André Laignel au congrès des maires, en novembre dernier.

André Laignel reste droit dans ses bottes. Durant tout le quinquennat, le premier vice-président de l’Association des maires de France (AMF) n’a eu de cesse de critiquer l’action de l’exécutif à l’égard des collectivités, pointant notamment un phénomène de “recentralisation”. Il monte de nouveau au créneau aujourd’hui, cette fois-ci pour critiquer la lettre que le Président-candidat Emmanuel Macron vient d’adresser aux maires. La confirmation de relations toujours aussi tendues entre les deux hommes, ce dont ils ne se sont jamais cachés…

“J’aurai besoin de vous”, lançait le Président sortant dans sa lettre, en promettant notamment, s’il est réélu, de donneraux élus “toutes les capacités d’agir”. L’occasion pour le chef de l’État de préciser son programme pour les collectivités territoriales après un premier quinquennat marqué par de nombreuses sources de frictions entre l’État et les élus locaux, notamment avec les 3 associations AMF, ADF et Régions de France. 

Le contenu de ce courrier présidentiel “traduit à la fois un bilan déconnecté des réalités vécues et une volonté de poursuivre la mise sous tutelle des collectivités”, critique ainsi André Laignel dans un message adressé (par mail) à des maires et qu’Acteurs publics a pu consulter. “Emmanuel Macron souffle sur les braises”, poursuit le maire d’Issoudun (Indre) et soutien de la candidate PS à la présidentielle, Anne Hidalgo. 

“Attaque contre l’autonomie fiscale”, “fait du prince”…

Dans son viseur notamment : la suppression proposée par Emmanuel Macron de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), que le Président-candidat promet de compenser “à l’euro près”. Un recours à une part de TVA est notamment évoqué. 

C'est “une nouvelle attaque contre l’autonomie fiscale”, affirme André Laignel. “La compensation promise par des dotations n’aura qu’un résultat : réduire toujours et encore l’autonomie des collectivités, en les laissant à la merci du montant des subsides qui leur sera accordé chaque année”, développe-t-il. Un discours que l’AMF avait déjà tenu au moment de l’annonce de la suppression de la taxe d’habitation. 

Le poids lourd de l’AMF critique également les “capacités institutionnelles” qu’Emmanuel Macron compte donner aux élus, et notamment la création du conseiller territorial. “C’est, selon André Laignel, une mesure comptable et démagogique, [elle] ne peut que marquer l’affaiblissement du département et de la région.” Quant à l’organisation “à la carte” proposée par le Président-candidat, celle-ci “pourrait vite se transformer en fait du prince”, estime André Laignel. Et d’ajouter : “Un tel retour des privilèges, ces statuts privés disparus avec la fin de l’Ancien Régime, pose le risque d’organiser la concurrence entre les territoires.” 

Un tour de vis budgétaire qui passe mal 

Dernier point abordé, sans surprise, par André Laignel dans son courrier : le tour de vis budgétaire qu’Emmanuel Macron demanderait aux collectivités en cas de réélection. Précisément 10 milliards d’euros d’économies. Un effort sur lequel le Président sortant ne s’épanche pas dans sa “lettre aux maires”. “Des engagements réciproques seront établis pour contribuer à l’indispensable maîtrise de la dépense publique”, se borne-t-il ainsi à annoncer. 

Le chiffre des 10 milliards, d’ailleurs, n’est pas du tout mentionné dans son courrier. Un regret pour André Laignel, qui en profite pour tacler la proposition présidentielle : “Cette contrainte est assurément irréaliste dans le contexte inflationniste actuel, c’est à croire que l’actuel Président n'est plus en prise avec les réalités du terrain.” L’occasion aussi pour celui qui est président du Comité des finances locales de répéter encore qu’Emmanuel Macron “n’a pas mis fin à la baisse des dotations” durant son quinquennat, ce que l’exécutif conteste. À ce propos, le Président-candidat promet, dans sa lettre, de “sanctuariser” les dotations des collectivités s’il est réélu. 

Montée au créneau d‘élus LREM

Il n’en a pas fallu davantage pour que le camp présidentiel monte lui aussi au créneau et critique l’initiative du soutien d’Anne Hidalgo. Son message est “scandaleux”, affirme ainsi Jean-René Cazeneuve, député LREM et soutien d’Emmanuel Macron. Celui qui préside la délégation aux collectivités et à la décentralisation de l’Assemblée nationale dénonce par ailleurs un “tissu de contre-vérités” de la part d’André Laignel : “C’est une rupture scandaleuse de la neutralité de cette association [l’AMF, ndlr] et une utilisation de ses moyens à des fins partisanes.”

“Ce message d’André Laignel est un tissu de mensonges et un concentré de haine en total décalage avec l’état d’esprit constructif de nos maires, tellement attachés à l’intérêt général”, a abondé le député LREM du Cher François Cormier-Bouligeon, pour qui la question de la démission d’André Laignel de l’AMF “est posée”. 

“Ce n’est pas un message de l’AMF mais un billet d’humeur d’André Laignel envoyé à des élus dont il est politiquement proche, comme il le fait régulièrement”, répond l’entourage du maire d’Issoudun, sollicité par Acteurs publics. Et de critiquer la position de Jean-René Cazeneuve qui, selon l’équipe d’André Laignel, “monte en épingle une polémique pour faire campagne, mais surtout pour faire oublier le contenu du courrier d’Emmanuel Macron aux élus, qui ne mentionne pas les 10 milliards d’euros d’économies, si peu…” 

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