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Laurence Mézin : “Il n’y a pas de grand soir de la QVT, le travail se fait par petites touches”

Directrice des ressources humaines du ministère de l’Intérieur, Laurence Mézin est sur tous les fronts et place la qualité de vie au travail (QVT) au centre de ses priorités, avec comme objectif constant de mesurer l’impact de ses actions. Rencontre.

Laurence Mézin, directrice des ressources humaines du ministère de l’Intérieur.

En quoi votre casquette de DRH ministérielle consiste-t-elle ? Sur quels sujets communs travaillez-vous ?
Il existe plusieurs sujets communs à tous les périmètres du ministère de l’Intérieur (police, gendarmerie, secrétariat général), comme la déontologie, l’égalité professionnelle ou encore la formation de certains personnels. Sur ces questions, il est très enrichissant de partager les compétences. Le ministère de l’Intérieur a un rôle particulier dans l’administration territoriale de l’État : il est à la tête du réseau des préfectures et a une responsabilité interministérielle de pilotage des DDI [les directions départementales interministérielles, ndlr], en lien avec les ministères compétents pour les missions de ces directions. À ce titre, il est en charge des négociations sur le sujet du télétravail, non seulement pour les services qui relèvent du comité technique ministériel, mais aussi pour les agents relevant du comité technique des directions départementales interministérielles. Si certains métiers ont leurs spécificités, nous pensons qu’il est possible de partager des règles. Un projet d’accord est en cours de négociation.

Au niveau du ministère de l’Intérieur, comment appréhendez-vous la question de la QVT ? 
Nous avons plusieurs défis à relever. Le premier est de combiner la qualité des conditions de vie au travail des agents et la qualité du service rendu au public. Nous avons le devoir de toujours réfléchir dans cette double optique individuelle et collective et de faire le maximum pour les agents. D’une manière générale, tout est irrigué de près ou de loin par la QVT. Action sociale, formation, temps de travail ou encore immobilier. À titre d’exemple, nous préparons notre déménagement et réfléchissons à l’organisation de nos futurs bureaux en matière d’espace et en prenant en compte le télétravail. Sur ce point, nous avons besoin de réfléchir ensemble. Je le redis, la QVT irrigue tout et partout, en administration centrale, territoriale, dans les préfectures et les services de police. Pour autant, il ne faut pas perdre de vue que la question reste souvent difficile à appréhender. 

Au début de la crise sanitaire et au moment du premier confinement, le télétravail a été installé de manière imparfaite mais nous en avons vite tiré les conséquences.

Avez-vous repéré une rupture concernant le télétravail au moment de la crise sanitaire ?
Absolument. La rupture a même été totale. Tout a changé du jour au lendemain. Il a fallu repenser l’organisation du travail au moment du confinement et après. Par exemple, au ministère de l’Intérieur, nous faisions très peu de télétravail. En revanche, dans certaines DDI, il y avait déjà cette culture. Nous sommes le ministère de l’urgence et de la crise, il est souvent indispensable d’être sur place et parfois même tôt le matin et tard le soir. Pour autant, il a fallu s’adapter aux circonstances. Au début de la crise sanitaire et au moment du premier confinement, le télétravail a été installé de manière imparfaite mais nous en avons vite tiré les conséquences. Avant 2017, le télétravail avait été mis en place dans la fonction publique, mais de manière très ciblée et surtout au niveau territorial pour des personnes en difficultés, en situation de handicap, par exemple. Aujourd’hui, nous approchons d’un taux d’équipement de 100 % pour toutes les missions télétravaillables. Conformément aux textes, le télétravail se fait toujours sur la base du volontariat. Dans le cadre de la négociation avec les organisations syndicales, j’aimerais promouvoir l’idée d’équilibre entre l’individuel et le collectif. 

Vous travaillez également sur une charte du temps de travail… 
Tout à fait. Il s’agit d’une problématique forte. L’idée est de produire un document commun pour promouvoir les bonnes pratiques en matière de temps de travail et de droit à la déconnexion pour tous les agents avec, peut-être un accent particulier sur l’encadrement et l’encadrement supérieur. Sans doute plus encore que les autres agents, ils ont été très sollicités pendant la crise sanitaire. Le télétravail doit être pris en compte dans la gestion du temps de travail notamment dans sa dimension de temps de coordination au sein d’une équipe. Nous aimerions élaborer une charte du temps de travail pour que chacun puisse avoir un document sur lequel s’appuyer.

Quels sont vos autres projets prioritaires ? 
Pour assurer une qualité de vie au travail des agents, notre rôle reste de les accompagner à plusieurs niveaux. En termes de réseaux de soutien, nous disposons d’un service qui regroupe des assistants sociaux, un service des inspecteurs santé et sécurité au travail, et bien sûr le service de la médecine du travail. Ils ont été très sollicités pendant la crise sanitaire. Durant cette période, nous avons mis en place une plate-forme d’écoute psychologique. En 2018, un service de recueil de témoignages des victimes de discriminations ou de harcèlement a été proposé. Les agents avaient et ont besoin d’avoir des personnes sur lesquelles compter. Cela fait partie intégrante du bien-être au travail. 

La culture du mentorat au ministère de l’Intérieur est très forte.

Comment faites-vous pour mesurer l’impact de vos actions QVT ? En quoi est-ce une nécessité ?
C’est absolument essentiel. Cela ne sert absolument à rien de mener des actions de QVT si aucune mesure n’est réalisée. Le ministère avait mis en place un baromètre social dans les directions départementales interministérielles en 2020. Nous avons prolongé l’exercice dans les préfectures et l’administration centrale. Il est important de mesurer l’état d’esprit des agents et les points de difficulté. Cela permet de mieux définir les politiques de remédiation. Nous avons mis en place des journées “prévention santé” en partenariat avec les mutuelles. Elles portaient notamment sur l’ergonomie du poste de travail, l’alimentation ou encore l’intérêt de pratiquer une activité sportive. Autre dispositif important, nous travaillons à la mise en place d’un salon de lactation au sein du ministère de l’Intérieur pour que les femmes puissent tirer leur lait dans de bonnes conditions. Ce n’est pas la grand soir de la QVT, mais le travail se fait par petites touches. 

La formation semble également être un axe fort de votre politique en matière de QVT…
La formation reste pour moi un outil de QVT à part entière. Au niveau du ministère, nous avons beaucoup travaillé au développement de la formation en ligne. Nous rendons ainsi les agents acteurs de leur formation et de leur montée en compétences. Sur le contenu, les thématiques sont diverses : la montée en compétences des agents, la préparation pour la promotion professionnelle et, dans le cas particulier du télétravail, le droit à la déconnexion et la formation des managers. Nous avons également lancé récemment un programme autour de la bienveillance et de l’intelligence émotionnelle pour les cadres supérieurs. Ils répondent présents. Ils sont nombreux à connaître une forte pression, beaucoup de stress sur les postes à hautes responsabilités, il y a parfois beaucoup de solitude. Partant de ce constat, la formation a pour objectif de proposer un groupe pour apprendre à mieux gérer ces situations, se préserver et développer un management bienveillant. De la même manière, au sein du ministère de l’Intérieur, nous attachons une importance à l’accompagnement à la progression professionnelle. Nous accompagnons aussi les agents lorsqu’ils passent un examen professionnel, nous les aidons à la rédaction des rapports sur les acquis de l’expérience professionnelle, mais aussi à la préparation des oraux. Pour les administrateurs de l’État, nous mettons en place des dispositifs de mentorat. La culture du mentorat au ministère de l’Intérieur est très forte.

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