Dénoncer les impérities du service public est un sport national : sa lourdeur, son manque d’empathie à l’égard du citoyen, son poids pour le budget de la nation… Pourtant, les équipes sur le terrain sont mobilisées pour bien servir la population et la plupart des administrations ont su gérer la crise Covid et assurer la continuité du service public. Paradoxe : d’un côté le dévouement des équipes et leur capacité d’action et de l’autre tous les problèmes affectant le service public en temps normal. Ce paradoxe est bien reconnu dans la sphère publique. Ainsi, une étude récente de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP, disponible en ligne ) pointe les insuffisances de l’organisation du travail dans l’administration et leur similitude avec celles des entreprises. Privé ou public, tous partagent les obstacles et conséquences de cette situation.
Par exemple, la diminution de l’engagement des salariés et agents en France (7% s’affirment engagés au travail, tandis que 75% s’estiment désengagés et 18% expriment activement leur mécontentement selon le baromètre de Gallup 2020) constitue une source de diminution de la productivité, de la qualité de service et de la capacité d’innovation. Autre exemple, les administrations comme les entreprises souffrent de la perte d’attractivité de la marque employeur par rapport aux nouveaux modes de management et aux entreprises de type start-up ou Gafam. Enfin, agents et salariés questionnent ouvertement leurs organisations sur le sens de leur engagement et le bien-être au travail, particulièrement les millenials – déjà 50% des salariés et 75% en 2030.
Imposer une transformation des services publics “par le haut et centralisée” c’est ajouter un paradoxe au paradoxe...
Sur d’autres points, les agents subissent davantage “d’irritants” que leurs homologues du secteur privé. Citons par exemple les processus de prise de décision souvent très lents, dont le parapheur – même dématérialisé – qui revient un mois plus tard avec un projet très éloigné de l’idée initiale, est un symbole ultime. Autres irritants fréquents, le sentiment d’être de simples exécutants ou de devoir travailler avec des outils hors d’âge, alors qu’ils utilisent des outils performants dans leur sphère privée. En conséquence, plus encore que certaines entreprises, l’administration manque d’attractivité, démontrée par la diminution du nombre de candidats aux concours externes.
La réponse doit-elle venir de l’État ?
Pour répondre à ces défis, la réforme de l’État a progressivement évolué d’un vocable centré sur les coûts et la performance (simplification, révision générale des politiques publiques) à une volonté de moderniser, puis de transformer l’organisation et le management dans l’administration. Signe de cette évolution, un ministère a été créé pour la transformation publique, avec la DITP, pour porter des projets et accompagner les ministères et opérateurs. Plus récemment, les discours du Président de la République et de la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques lors la convention managériale de 2021 évoquent la transformation managériale. La décision au plus proche du terrain, la bienveillance, la responsabilisation sont avancés comme clés pour faire évoluer les modes de management dans l’administration. La question reste : comment faire concrètement ?
Nous avons la conviction qu’imposer une transformation des services publics “par le haut et centralisée” c’est ajouter un paradoxe au paradoxe déjà évoqué. Ce nouveau paradoxe sera de surcroît contre-productif car il véhiculera auprès des agents et de dirigeants publics un message implicite selon lequel ils “ne savent pas comment travailler”.
Chaque dirigeant public peut s’engager. Nous proposons une approche différente, fondée sur quelques principes simples :
• Faire confiance aux dirigeants d’entités publiques locales et à leurs équipes dans leur capacité à mener une transformation managériale, propre à eux ;
• Commencer par quelques entités dont les dirigeants sont volontaires et ont adopté le comportement de leaders au service de leur équipes et ceci quel que soit le type d’administration (établissements de santé et médico-sociaux, opérateurs, collectivités locales, organismes paritaires, directions d’administration centrales…) ;
• Construire une communauté de partage d’expériences de transformations et de perfectionnement du leadership de transformation de dirigeants de ces entités ;
• Accompagner et nourrir les leaders transformateurs, avec un appui extérieur s’il le faut ;
• Inspirer les autres dirigeants des établissements publics et les entourer pour le lancement de leurs propres transformations.
Le cercle a vocation à illuminer et partager ses expériences, pour aider un nouveau mode de management fondé sur la confiance à émerger dans les administrations.
Le Cercle des Pionniers de la Libération de l’Administration agit. Depuis un an, il rassemble les dirigeants publics engagés dans une démarche de transformation afin de libérer des énergies de leurs collaborateurs au service des usagers. Au sein d’une communauté de confiance, les pionniers se nourrissent du partage et de la réflexion collective sur leurs démarches de libération. Le cercle se réunit lors de séminaires bimensuels, jalonnés de voyages apprenants et de rencontres inspirantes. Au-delà, le cercle a vocation à illuminer et partager ses expériences, pour aider un nouveau mode de management fondé sur la confiance à émerger dans les administrations. Vous êtes un directeur d’une entité publique (administration, hôpital, opérateur, collectivité, organisme paritaire…), vous vous reconnaissez dans ces idées et vous avez déjà commencé de transformer votre mode managérial pour le baser sur la confiance et la responsabilité – vous pouvez vous joindre à ce mouvement.
Le Cercle des Pionniers de la Libération de l'Administration (cercle.pionniers@gmail.com)
