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Anne Duclos-Grisier : “La Dila est au cœur de la transformation numérique de l’État”

Ouverture des données, refontes de ses sites Web, mesure de la satisfaction des usagers, recours à l’intelligence artificielle : la directrice de l’information légale et administrative (Dila), Anne Duclos-Grisier, détaille pour Acteurs publics les grands axes de son plan stratégique pour 2024.

Ce n’est pas le premier, mais pourquoi la Dila a-t-elle besoin d’un plan stratégique ?
Ce plan 2021-2024 s’inscrit dans la continuité des précédents plans, mais la démarche reste très importante car son élaboration a permis de consacrer plusieurs mois à prendre de la hauteur et du recul pour essayer de nous projeter quelques années en avant sur les évolutions technologiques et celles de nos métiers, et notamment de s’interroger sur la poursuite de nos activités “papiers”. Par ailleurs, sa rédaction est un acte de management qui nous permet d’associer les agents à la réflexion pour construire ensemble l’avenir de la direction, leur donner des orientations claires et qu’ils trouvent du sens à leur action.

Comment a-t-il été coconstruit avec les agents ? 
Nous avons d’abord organisé des ateliers ouverts à tous, qui ont abouti à des propositions que l’on a ensuite mises au vote sur une plate-forme collaborative, principalement sur les questions transversales de notre direction : la qualité de vie au travail, la RSE, le sentiment d’appartenance à un collectif… Nous avons également adopté cette approche sur les questions métiers, pour essayer de décloisonner les services et de mieux faire collaborer les différentes équipes. Leurs contributions ont donné lieu à toute une série de propositions très concrètes comme le recyclage des déchets, la réduction de la consommation énergétique de nos bâtiments pour les aspects RSE, ou bien le développement de la formation des managers pour améliorer la qualité de vie au travail. 

Quels sont les grands axes et projets de ce plan pour 2024 ? 
Notre ambition est de faire de la Dila un acteur majeur dans la relation renouvelée entre les usagers et l’administration et d’en faire un levier de modernisation de l’État. Cela se manifeste essentiellement dans le domaine du numérique. Historiquement, nous étions une administration connue pour imprimer le Journal officiel, mais aujourd’hui, nous sommes une administration au cœur de la transformation du numérique de l’État, pour faciliter la vie au quotidien des usagers et citoyens, en leur donnant accès à une information la plus riche, fiable et compréhensible possible. 
L’autre grand axe de ce plan est d’affirmer de manière encore plus forte notre volonté de placer l’usager au centre de nos attentions. En visant notamment un standard de qualité élevé en termes de relation à l’usager. C’est une posture que nous avons largement déployée sur Service-public.fr mais que l’on gagnerait à renforcer dans d’autres domaines. Nous allons également poursuivre nos travaux pour rechercher une plus grande complémentarité entre les différents canaux d’accès à l’usager : site Web, messagerie, téléphone, réseaux sociaux, guichets physiques, enquêtes…

La démarche d’inscription sur les listes électorales a été refondue pour qu’elle soit plus fluide et claire à l’approche des élections de 2022.

Vous insistez sur la place centrale de l’usager et sur la prise en compte de ses besoins. Comment cela se traduit-il concrètement ? 
Notre objectif est de renforcer notre démarche de mesure de la satisfaction des usagers, en l’appliquant à l’ensemble de nos sites avec une méthodologie partagée grâce à un “Observatoire des usagers”. Aujourd’hui, cette mesure est réalisée de manière plus ou moins fine en fonction de nos sites et sans approche véritablement transverse. Nous allons ainsi systématiser les enquêtes de satisfaction, sous différentes formes, en fonction de nos sites et catégories d’usagers. Nous allons généraliser certaines méthodes, comme l’A/B testing pour pouvoir tester telle ou telle évolution de fonctionnalité ou de parcours utilisateur, comme nous le faisons déjà beaucoup pour Service-public.fr [l’A/B Testing consiste à tester plusieurs évolutions d’un même produit auprès de différentes groupes d’utilisateurs afin d’identifier laquelle est la plus efficace, ndlr].

Quels sont les grands projets à venir à destination des usagers ? 
Le site Service-public.fr va connaître une importante refonte pour adapter son apparence au design system de l’État, et déployer davantage de fiches simplifiées pour mieux guider les usagers dans leurs démarches. À ce titre, la démarche d’inscription sur les listes électorales a été refondue pour qu’elle soit plus fluide et claire à l’approche des élections de 2022. La refonte permettra de tenir la charge pour la prochaine échéance électorale. Elle améliore aussi le parcours usager, permet à celui-ci de suivre l’avancement de sa demande, de lui fournir un récépissé, de transmettre des adresses normalisées au répertoire électoral unique et, d’ici la fin de l’année, de fusionner les pièces justificatives. Nous expérimentons également, pour la démarche de demande d’autorisations d’urbanisme, un mécanisme de rappel téléphonique par notre centre d’appels interministériel de Metz pour aider l’usager à constituer son dossier lorsqu'il rencontre des difficultés. Nos sites économiques (le Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, le Bulletin officiel des annonces de marchés publics) vont également connaître une refonte complète en 2022.

Quand on pense à la Dila, on pense surtout à ses sites orientés “usagers du service public” que sont Service-public.fr et Légifrance, mais qu’en est-il de vos projets pour vos utilisateurs dans les administrations ? 
Le plan stratégique prévoit à ce sujet un programme appelé “Nouveaux outils de production normative”. C’est un programme aussi ambitieux que la refonte de Légifrance, qui vise à dématérialiser de bout en bout toute la chaîne régalienne de la rédaction des textes officiels comme les lois et décrets, jusqu’à leur publication au Journal officiel. Aujourd’hui, l’application Solon [système d’organisation en ligne des opérations normatives, ndlr] permet simplement aux ministères d’envoyer au secrétariat général du gouvernement leur texte finalisé et d’en suivre l’évolution selon les différents arbitrages et son passage au Conseil d’État. L’idée est de concevoir un ensemble d’outils pour aider les ministères à rédiger leurs textes, là où chacun utilisait ses propres outils, quand ils en avaient. Cela permettra d’uniformiser et de fiabiliser la production des textes en amont dans un format structuré et standardisé, et donc de simplifier et d’accélérer la consolidation des textes en aval. Avec un gain aussi bien pour les ministères que pour l’usager qui consultera le texte sur Légifrance, puisque le texte sera rendu accessible plus rapidement.

L’objectif est d’aller toujours plus vite dans la consolidation des textes officiels pour que le droit soit parfaitement à jour, et qu’il soit lisible et accessible le plus vite possible.

Comment comptez-vous utiliser les nouvelles technologies, et notamment l’intelligence artificielle (IA) ?
Nous avons justement lancé, en juin, une expérimentation de l’intelligence artificielle pour aider à la consolidation des textes diffusés sur Légifrance. En analysant l’importante base de consolidation de textes que nous avons constituée depuis des années, cette technologie pourrait nous aider à réécrire automatiquement un texte normatif lorsque paraît un nouveau texte qui le modifie. Trois entreprises explorent actuellement avec nous les différentes manières d’utiliser l’IA pour gagner du temps dans ce procédé, rendu nécessaire par l’accroissement du volume de textes à consolider et le recours croissant à des entrées en vigueur différées. Aujourd’hui, 8 personnes sont chargées chez nous de cette consolidation des textes, qui peut parfois prendre plusieurs semaines pendant les périodes les plus denses, notamment en fin d’année. L’objectif est d’aller toujours plus vite dans cette consolidation pour que le droit soit parfaitement à jour, et qu’il soit lisible et accessible le plus vite possible, le lendemain de la parution d’un texte au Journal officiel. Plus généralement sur l’IA, l’enjeu des prochaines années sera de dépasser le stade des expérimentations pour parvenir à industrialiser.

Quelles sont les prochaines échéances de votre politique d’ouverture des données ?
La Dila a toujours été un bon élève de l’ouverture des données. Le nouveau Légifrance, lancé il y a un an, intègre toute une série d’API pour diffuser en direct les données. Et elles rencontrent un succès grandissant : début 2020, nous ne comptions que 56 000 requêtes par mois, aujourd’hui, on tourne autour de 2,2 millions, voire 2,8  millions de requêtes mensuelles par 60 utilisateurs différents, dont le site du code du travail numérique, l’application Monalisa du Sénat pour suivre l’évolution des textes de lois examinés par le Parlement ou encore l’application pour mobile “Hélia”. La prochaine étape interviendra en même temps que la refonte de nos sites économiques. Là aussi, nous permettrons de récupérer par API l’ensemble des données économiques qui y sont diffusées, en particulier sur les annonces civiles et commerciales et les marchés publics. Nous allons d’ailleurs travailler avec Etalab afin de réfléchir aux moyens de favoriser la réutilisation de ces données, que ce soit par les administrations ou par des acteurs extérieurs.

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Club des acteurs publics

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